UP, des équipements aux bras d’acier

salle C

Les dizaines d’artistes qui poussent chaque jour [énergiquement] les portes de UP - Circus & Performing Arts, à Molenbeek-Saint-Jean, vous le confirmeront sans sourciller : le nouveau lieu offre un confort de travail plutôt bien apprécié, grâce à des équipements ouverts à [presque] tous les possibles…

 

En visitant les 3.000m2 intérieurs [et autant à l’extérieur] de cette véritable forêt d’ancrages, de poulies & d’accroches, qui se souviendra qu’il y a 1 an à peine, l’ancien espace industriel n’avait jamais vu le moindre agrès circassien ? Et pour cause, en un temps record, les équipes de soudeurs, de gréeurs et de riggeurs ont réalisé une sacré métamorphose. Vincent Rutten, spécialiste en ferronnerie, et Joppe Wouters, inventeur de l’extrême & pro du rigging, reviennent avec nous sur quelques-uns des secrets qui leur ont permis de transformer cette ancienne imprimerie en un espace « 100% circassien ». 

 

 

 

En septembre 2021, c’est une mue totale qu’opère UP – Circus & Performing Arts. Installé depuis 1995 dans les anciennes Glacières de Saint-Gilles, le Centre international de Création déménage à Molenbeek-Saint-Jean, sur le site de l’ancien siège de Delhaize, dont la superficie fait rêver : 3.000m2 en intérieur, et autant en extérieur, avec une vaste esplanade permettant d’installer des scénographies urbaines et des chapiteaux. Aujourd’hui, le bâtiment s’offre à [presque] tous les rêves de Cirque : plusieurs StudiOs et Open-Spaces permettent de travailler de nombreuses disciplines circassiennes, avec des équipements [hautement] adaptés aux [multiples] pratiques actuelles. 

Mais comment une ancienne imprimerie s’est-elle si vite transformée en un espace 100% circassien ? « Avec une bonne dose de créativité technique, n’importe quel lieu peut être équipé pour le Cirque », estime Vincent Rutten, fondateur de la société L’Entrepool, spécialisée dans la construction de décors et l’aménagement d’espaces scéniques. « Mais il faut accepter et aimer les défis particuliers ! », ajoute-t-il. À UP, son équipe a réussi un tour digne de la magie nouvelle! 

 

Un usage organique 

 

Dès leurs premières visites des lieux, Catherine Magis & Benoît Litt, à la codirection de UP, ont perçu la potentialité des espaces, forts de leurs années d’expériences dans les Anciennes Glacières. « Nous avions l’expérience de la gestion d’un lieu à la base non-circassien », expliquent-ils. « Et nous venions de mener pendant une dizaine d’années un projet architectural qui n’avait hélas pas pu voir le jour. Nous avons donc rapidement visualisé l’organicité des différentes espaces, en tenant compte du fait qu’on garderait la structure du bâtiment existant, sans gros travaux. » Les espaces d’entraînement, de création et de formation se dessinent rapidement. L’idée ? « En faire un lieu de tous les possibles, avec un maximum d’accrochages aériens et d’ancrages au sol ». 

 

 

Le premier défi ne sera pas des moindres : il s’avère que le plafond du bâtiment ne peut supporter aucune charge en traction. « Ce sont des hourdis en béton qui ne peuvent pas supporter énormément de poids. », explique Vincent Rutten. Or les agrès de Cirque créent des dynamiques qui exigent précisément des accroches à la fois solides et souples. Comment faire, dès lors, pour assurer la fermeté des arrimages ? « Nous avons décidé de réaliser un système autoportant », explique Vincent. Des portiques en poutres d’acier ont été spécialement fabriqués en atelier, pour venir épouser la structure intérieure du bâtiment. Leurs pieds ont été vissés sur la dalle de béton au sol, tandis que les poutres transversales, proches du plafond, permettent toutes les accroches. « On a donc une structure autonome, que nous avons montée en partie à l’intérieur des salles, comme un mécano. » 

Et ça tient bien ? « Haha, oui on peut y aller ! », réagit Vincent. « La construction a d’abord été validée par un ingénieur. Le Cirque a la spécificité d’imprimer énormément de mouvement à la structure sur laquelle il se travaille. Les tractions peuvent s’effectuer en tous sens : il faut donc tout prévoir. La force dynamique et l’impact propre aux techniques de Cirque ont été injectés dans un logiciel qui permet de vérifier comment, à l’usage, les sections d’acier vont réagir. Tous les pieds des portiques ont une platine vissée chimiquement dans le sol. Il n’y ni cisaillement ni rebondissement possible. Et la stabilité latérale est également assurée par un vissage dans les murs ». Pour Vincent Rutten et son équipe, le véritable défi s’est joué dans l’installation. Il s’agissait de perdre le moins de hauteur possible : le bâtiment plafonne à 6 mètres, ce qui n’est déjà pas énorme pour certaines disciplines aériennes. « On a parfois sué pour faire coulisser les poutres là-haut et pour contourner certains tuyaux de chauffage au plafond. Mais rien n’est impossible ! » 

 

 

Modulation & solution 

 

À cet ensemble de portiques est ensuite venu s’ajouter un réseau de perches plus légères : les célèbres tubes de section « 48 » que l’on voit dans tous les théâtres, lorsqu’on lève le nez vers les projecteurs. La norme très courante de ce type de structure supplémentaire permet tout type d’installation, selon les besoins des Artistes ou des Compagnies, notamment dans la Black Box, lieu de répétitions et de représentations.  

 

 

 

On ne construit pas ce genre de mécano de plusieurs tonnes sans passion. Joppe Wouters, spécialiste du gréage et de la soudure en tout genre, partage le goût pour le défi. « Il y a toujours des solutions ! », s’exclame-t-il. Et à UP, il le prouve. Associé dès les débuts à la transformation circassienne des espaces, Joppe a fait la suggestion d’une foule d’idées astucieuses. Il a ainsi élaboré un système qui permet d’installer des mâts chinois en quelques instants, sans haubans : on fixe simplement le tube à deux semelles, l’une vissée au sol, l’autre aux poutres bétonnées du plafond. Il a également suggéré l’emploi d’anneaux mobiles pour les ancrages au sol. L’anneau, dont la tête tourne, résiste à des tractions dans toutes les directions. Parmi d’autres suggestions qui facilitent le quotidien, il a aussi installé un système de poulies pour les agrès aérien. On peut descendre les attaches pour installer ou retirer son cerceau ou son tissu, sans besoin d’échelle ni d’escalade périlleuse. Un sérieux temps gagné pour un lieu où énormément d’artistes s’entraînent et se partagent les espaces. 

Au final, c’est la liste de toutes ces techniques spéciales qui donne le vertige, depuis les systèmes de danse aérienne sur l’une des façades, jusqu’aux mille & un ancrages soutenant toutes les transformations. « L’équipe de UP avait une vision très précise des besoins du lieu. Ils souhaitaient pouvoir faire le plus possible, de la façon la plus interchangeable possible. Et je pense que c’est très réussi ! », répond Joppe Wouters. « C’est un énorme et magnifique progrès par rapport aux Glacières. »  

 

 

Ultime défi technique : l’ensemble des installations devait être démontable et réutilisable dans un autre cadre, puisque à terme, l’occupation de l’ancienne imprimerie fera place à une nouvelle construction. « Les dispositifs ne sont pas structurels et peuvent être aisément démontés-remontés pour d’autres espaces et d’autres utilisations », notent Catherine Magis & Benoît Litt. Mais pour l’heure, il faut surtout l’utiliser ! Nul souci de ce côté : « Le message du déménagement et des nouvelles installations est très bien passé », se réjouissent les codirecteurs. Les artistes sont de plus en plus nombreux à pousser la porte du nouveau lieu pour leurs entraînements, leurs recherches ou leurs créations. 

 

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